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Graphosphère : Dr Anne MALGOIRE LORIN
Dr Anne MALGOIRE LORIN : Les Etapes du Developpement Affectif de l’enfant, illustrées de dessins


Dr Anne Malgoire Lorin

Pédopsychiatre

malgoirelorin@orange.fr

 

Cours préparation concours IUFM

 

L’affectivité est le domaine des émotions et des sentiments.

Le développement affectif est une longue suite d’expériences plus ou moins conflictuelles, entre le sujet et son entourage, mais aussi à l’intérieur du sujet (perspective psycho-dynamique).

Le développement affectif sera envisagé du point de vue de la théorie psychanalytique, dont l’apport a été fondamental. D’autres données tirées de l’observation clinique, de travaux de psychologie expérimentale, et de l’éthologie seront évoquées.

INTRODUCTION

« Les dangers pulsionnels rendent les hommes intelligents » Anna FREUD, 1936.

L’œuvre de Freud est une immense réponse (inachevée…) à la question : quelle est la cause de nos actes ? comment fonctionne notre vie psychique ?

Quelques notions psychanalytiques de base :

1- l’inconscient

Il y a dans le comportement humain, des actes inattendus, qui surgissent dans notre conscient et dépassent nos intentions : actes manqués, lapsus, oublis, rêves, apparition de telle ou telle idée, comportements affectifs, choix amoureux inexpliqués. Ils sont surprenants et énigmatiques pour la conscience du sujet.

Ces actes non intentionnels font supposer l’existence d’un inconscient qui agit en nous sans que nous le sachions, et détermine ce que nous sommes.

 

2 - les pulsions

Les pulsions sont ce qui nous anime depuis notre naissance, le moteur de notre existence. Elles donnent naissance à nos émotions, nos espoirs, nos craintes, nos conflits, nos comportements, nos actes. (3)

 

Elles sont l’expression concrète et psychologique des intérêts profonds de l’être humain.

- Pulsion de vie (eros) :

La Libido est l’énergie de la pulsion de vie. Son but, c’est le nouage des liens entre notre psychisme, notre corps, les êtres et les choses (9).

Elle se manifeste différemment tout au long du développement ; elle investit des zones du corps privilégiées dites zones érogènes (orale, anale, phallique) avant de se centrer sur la sexualité génitale adulte.

 - Pulsion de mort (thanatos) :

Elles visent à la déliaison, au détachement de la libido des objets, et au retour de l’être vivant à la tension zéro (9).

Elles «tendent à la réduction complète des tensions, c'est-à-dire à ramener l’être vivant à l’état anorganique. »(6)

Elles sont tournées vers l’intérieur : autodestructrices, et vers l’extérieur : pulsions d’agression et de destruction.

 

Pulsion de vie et pulsion de mort sont antagonistes et indissociables.

 

Au-delà de leur différence, pulsion de vie (augmenter la tension) et pulsion de mort (retour à la tension zéro) ont un trait commun : elles tendent à reproduire, répéter une situation passée : plaisante ou déplaisante. La tendance à la répétition des échecs et des souffrances – compulsion de répétition - s’explique par cette compulsion à reprendre ce qui n’a pas été achevé, avec la volonté de le compléter (9).

 

 

3 - Les instances de la personnalité : la 2ème topique Freud 1920

Elles nous gouvernent 

- Le çà :

C’est le pôle pulsionnel de notre personnalité, le réservoir de l’énergie psychique. Ses contenus sont inconscients.

Il obéit au principe de plaisir.

Il entre en conflit avec le Moi et le Surmoi.

 

- Le Moi

C’est le médiateur entre : les exigences pulsionnelles du çà, les contraintes de la réalité, les exigences du Surmoi. Il est chargé des intérêts de la totalité du sujet. Il assure la stabilité et l’identité de la personne. Il doit préserver son autonomie.

Il est chargé de la lutte contre l’angoisse liée aux conflits, par les mécanismes de défense.

 

- Le Surmoi : instance « morale », interdictrice, interne, inconsciente.

Il « est l’héritier du complexe d’Œdipe » Freud. Il se construit par identification aux images parentales intériorisées. Il prend à son compte les exigences attribuées aux parents. Il se montre souvent plus sévère que les parents eux-mêmes.

 

- L’Idéal du moi : autre instance morale :

Modèle idéal à partir des valeurs morales et éthiques auxquelles le sujet cherche à se conformer

Héritier du « narcissisme (idéalisation du moi) et des identifications aux parents et aux idéaux collectifs » (6): Fais ceci ; sois comme ton père ; pense comme lui ; sens comme lui.

 

4 - Le refoulement :

« Opération par laquelle le sujet cherche à repousser ou à maintenir dans l’inconscient des représentations (images, pensées, souvenirs) liées à une pulsion » (6)

C’est une chape d’énergie qui empêche le passage des contenus inconscients vers le préconscient (9).

 

 

LES STADES DU DEVELOPPEMENT

 

Les premières expériences affectives sont fondamentales pour l’avenir psychologique de l’enfant et de l’adulte.

Mais, Anna FREUD comparait la vie à une partie d’échecs : les premiers coups sont très importants, mais tant que la partie n’est pas terminée, il reste de jolis coups à jouer.

 

Bien sûr, Sigmund FREUD est le père fondateur de la psychanalyse et le 1er à étudier la sexualité infantile : en particulier les stades génitaux avec le complexe d’Œdipe ; ces travaux ont été poursuivis par Anna Freud, Mélanie KLEIN et D.W.WINNICOTT qui se sont particulièrement intéressés aux stades précoces – prégénitaux- (M KLEIN conflits intra psychiques, WINNICOTT conflits inter psychiques).

 

Les différents stades ne sont pas nettement séparés les uns des autres. Ils passent plus ou moins graduellement l’un dans l’autre et se chevauchent.

 

On distingue les stades prégénitaux et les stades génitaux.

 

 

1°) LE STADE ORAL :

De la naissance jusqu’à 15 mois.

Stade prégénital

 

 A) LES INTERETS DU NOURRISSON :

Ils sont plus limités que ceux de l’enfant plus grand.

a) Gratifications orales alimentaires : le plaisir d’être nourri, par la tétée.

b) Gratifications orales non alimentaires : le plaisir tiré de la succion : de la tétine, du pouce.

c) Autres gratifications : tactiles (contact peau à peau)[ application : « bébé kangourous »], kinesthésiques ( besoin d’être tenu, bercé), auditives, olfactives ( reconnaissance de l’odeur de la mère dés les 1ers jours) mais aussi chaleur. Un maternage de bonne qualité suppose la prise en compte de tous ces besoins.

BOWLBY (1958) a insisté sur l’importance des liens non alimentaires entre le bébé et la mère, un besoin primaire d’attachement, de contact interpersonnel et social : s’exprimant dans des conduites visant à retrouver ou à maintenir la proximité avec la mère (ou son substitut).

Exp. HARLOW : de jeunes singes macaques rhésus séparés précocement de leur mère, mis en contact avec une mère artificielle nourricière en fil de fer ou avec une mère artificielle non nourricière de contact agréable, choisissent le leurre maternel en tissu.

 

 

 B) LA RELATION D’OBJET :

 a) pendant les premières semaines :

Il n’y a pas de distinction claire entre le sujet et le monde extérieur

Il y a alternance entre états de tension et de bien être ; déplaisir / plaisir ; besoins de l’enfant et réponses maternelles

Le bébé est actif dans la relation.

La protection contre les stimuli externes est double :

- du côté du bébé : il a une barrière : il module sa vigilance, son attention

- du côté de la mère : rôle capital de pare excitation.

Freud : états de bien être = narcissisme primaire

Klein : états de bien être= bon objet / tension : mauvais objet que l’enfant tente d’écarter

Données récentes : basées sur l’observation directe :

Compétences du nourrisson : capacité à participer activement à l’interaction avec son entourage, sa mère en particulier : Orientation sociale primaire BOWLBY (2), « Amour primaire » BALINT

 

 b) l’accès à une relation objectale :

L’enfant identifie le monde extérieur en différenciant le personnage humain, des choses, dont l’enfant dispose longtemps, comme des parties de lui-même.

 

2 modèles de développement :

1- Les processus d’intégration : l’intégration progressive d’expériences de reconnaissance partielle amène à la reconnaissance d’autrui

- SPITZ (10): 3 périodes importantes appelées « organisateurs » (phases critiques et vulnérables)

+ Réponse sociale de sourire : 8ème semaine

Au sein de la dyade mère nourrisson : plaisir de la mère, renforcement des interactions ; répétitions d’expériences qui permettent à l’enfant de relier la représentation de quelque chose d’extérieur à ce qu’il éprouve en lui-même.

+ Angoisse du 8ème mois :

L’enfant ne répond plus par le sourire à n’importe quel adulte : distinction familier/ étranger

Devant l’étranger, en l’absence de la mère : l’enfant baisse les yeux, se détourne, voire pleure.

Conceptions actuelles :

La reconnaissance de la mère comme objet total se fait progressivement à une période antérieure au 8ème mois

Et, l’angoisse de perte de la mère est plus précoce que l’apparition de réactions manifestes de peur face à un non familier.

Conceptions modernes des affects primaires (ENGEL) :

Il existe 2 grands types d’affects qui sont des comportements de base chez l’homme et dans d’autres espèces, réponse psycho biologique de l’organisme à des situations traumatiques :

 - l’affect angoisse : réponse à un danger menaçant

 - l’affect dépressif : réponse à un danger qui s’est réalisé

+ Le non : 3ème organisateur, entre 12 et 18 mois :

Le non est dit ou exprimé par geste avec un plaisir manifeste.

L’enfant imite le geste de la mère qui interdit un certain nombre de choses ; ce qui lui permet de « s’identifier à l’agresseur », et d’acquérir un certain pouvoir sur le monde extérieur.

 

2- Les processus de différenciation :

Perception syncrétique (appréhension globale et indifférenciée) du monde extérieur dont se dégage progressivement autrui et soi

- MALHER (7): - 1ère phase qualifiée d’ « autistique », ou de fusion, de symbiose ; de la naissance à 6 mois.

- Puis processus de séparation- individuation :

1- différenciation, exploration : de 6 mois à 1 an, à proximité de la mère

2- phase d’exercices et d’entraînement : progrès instrumentaux considérables, l’enfant se lance à l’aventure, mais revient souvent vers la mère (fin de 1ère année, début 2ème année)

3- phase de rapprochement (cf. début du stade anal)

 

- WINNICOTT(11 et 12) : pédiatre puis pédopsychiatre anglais

Son originalité a consisté à mettre en évidence l’influence de l’environnement sur le développement psychique (à partir de sa pratique psychanalytique et de l’étude des carences affectives et éducatives précoces, et des psychoses infantiles)

1er stade de « dépendance absolue » : où la mère n’est pas perçue : il est fondu avec elle ; elle est un support « holding » qui soutient physiquement et psychiquement l’enfant, et représente tout ce qu’apporte l’environnement.

« La mère suffisamment bonne » : qui s’identifie étroitement à son bébé, et s’adapte à ses besoins ; ce qui permet à l’enfant de développer son potentiel inné : physique et psychique.

L’enfant peut éprouver un sentiment de continuité d’existence et faire apparaître son vrai soi «  vrai self »

Du côté de la mère cette période est appelée «  préoccupation maternelle primaire »

2ème phase de « dépendance relative » : l’enfant perçoit sa mère comme séparée de lui ; il a acquis une représentation de la mère qui lui permet de patienter; il conçoit les objets comme extérieurs au soi (self)

« La mère suffisamment bonne » se dégage peu à peu de l’identification intense : elle reprend sa vie personnelle et/ou professionnelle, et introduit des « défauts d’adaptation » ajustés au développement de l’enfant : qui permettent à l’enfant de grandir : y arriver par soi même est la racine de la confiance en soi.

On doit à Winnicott la notion d’objet transitionnel : apparaît au cours du il s’agit d’un objet (un tissu, un bout de couverture, une peluche, …) que l’enfant utilise à l’occasion des séparations avec la mère, et au moment de l’endormissement. Il représente la mère, il est à mi distance entre une partie de soi et un objet extérieur ; espace transitionnel situé entre la réalité intérieure et la réalité extérieure. Il est utilisé pour le passage de la fusion à la différenciation, pour lutter contre l’angoisse dépressive, de séparation. Le choix d’un objet transitionnel, au cours du second semestre de la vie, est un processus normal dans le cheminement vers l’individuation.

[Dans les situations où la mère s’absente pour un temps qui dépasse la capacité de l’enfant à la maintenir vivante dans son souvenir :

 - usage excessif de l’objet transitionnel : tentative de déni de la séparation et du sentiment de perte de la mère

 - puis désinvestissement de l’objet]

 

 

2°) LE STADE ANAL :

Deuxième et troisième année.

Stade prégénital

 

 A) LES INTERETS DE L’ENFANT :

 

Il s’agit de la période où se développe le contrôle sphinctérien anal volontaire.

L’évacuation devient une fonction active : l’enfant a le choix :

 - de pousser et d’expulser

 - ou de retenir

Le plaisir d’exercer cette fonction nouvelle est vif.

Mais il ne supprime pas les satisfactions orales.

 

La zone érogène prédominante (source de la pulsion) est la muqueuse de la zone intestinale d’excrétion (ano-recto-sigmoïdienne)

Elle est excitée par le contenu intestinal : le boudin fécal, considéré comme une partie du propre corps de l’enfant qu’il peut soit conserver à l’intérieur, soit expulser au dehors, en s’en séparant.

Ce qui permet à l’enfant de distinguer : objet interne et objet externe

Angoisse anale = être vidé

 

L’enfant ressent des sensations agréables pendant l’expulsion / et pendant la rétention des matières fécales

Le type de plaisir tiré du contrôle sphinctérien (rétention-expulsion) se retrouve dans :

 - la manipulation motrice : garder-jeter, retenir-lacher

 - l’activité motrice

 - l’échange : cadeau, argent,…

 

 B) LA RELATION D’OBJET

Ambivalente et conflictuelle :

1-conflit de demande entre

 - la mère qui exige que l’exonération se fasse quand elle veut et comme elle veut

 - l’enfant qui veut maîtriser le plaisir de retenir ou d’expulser (plaisir d’exercice), exercer son propre pouvoir, s’opposer à la mère

2-double plaisir

- se soumettre pour être aimé de la mère

- s’opposer pour exercer le pouvoir, dominer la mère

Relation agressive : conduites d’opposition, comportements destructeurs, aspect sado masochique des échanges avec la mère (domination/soumission).

Cette période correspond à la période d’opposition : du non (3ème organisateur de SPITZ).

Dans le processus de séparation-individuation (MALHER), cette période (de 15 mois à 2 ans) est la période de rapprochement où la mère doit répondre à 2 demandes contradictoires : désir d’autonomie, d’exploration du monde, d’affirmation de soi / et besoin de rapprochement. Quand ce retour à la mère est empêché : angoisse de séparation intense.

D’où l’importance de l’objet transitionnel

Signe clinique important de ce processus d’individuation : l’enfant de 3 ans maîtrise l’usage du «  je ».

 

En conclusion, c’est une période souvent assez difficile pour l’enfant et son entourage.

Chez l’enfant : angoisse visible dans l’effondrement après la colère, les rituels du coucher, le refuge dans des activités auto érotiques (succion du pouce,…), les manifestations de protestation, de tristesse, ou d’angoisse lors de la séparation.

Du côté des parents : intolérance aux manifestations d’opposition, inquiétudes devant les manifestations d’angoisse de leur enfant.) « 1ère adolescence »

 

 C) L’ORGANISATION DE LA PERSONNALITE

Progrès du Moi : grâce à une meilleure représentation de soi, de l’image du corps.

C’est la période où dans le dessin apparaît le bonhomme.

 

Avant le bonhomme : enroulement garçon 2 ans

 

 

Premier bonhomme fille 2 ans 7 mois

 

 

 


Autoportrait garçon 3 ans 5 mois (le petit bonhomme représente la mère)

 

Premières identifications : conduites d’imitations, avec souvent identification à certains comportements d’autrui : identification à l’agresseur qu’on retrouve dans le non, les conduites, le jeu,…

« Moi idéal mégalomane narcissique »LAGACHE, en rapport avec la pensée magique de toute puissance, dans une relation duelle avec la mère.

 

3°) LA PHASE PHALLIQUE :

(stade prégénital ; relation d’objet reste duelle)

Valable pour les 2 sexes : pénis / clitoris

3ème 4ème année

 

 

Autoportrait, garçon de 4 ans

 

Autoportrait fille 4 ans 5 mois

 

A) LES INTERETS DE L’ENFANT :

- Primauté de la zone génitale : la zone génitale qui était le siège d’impressions et d’excitations agréables depuis la toute petite enfance, mais reléguée au second plan par l’intensité des expériences vécues au niveau oral , puis anal, devient la zone érogène dominante.

1) Plaisir à uriner : il a un double caractère :

 - signification phallique, voire sadique ; la miction est l’équivalent d’une pénétration active, liée à des fantasmes d’endommager ou de détruire.

 - «  laisser couler » plaisir passif d’abandon des contrôles; être caressé.

Chez les filles, ce laisser couler est quelquefois déplacé de l’urine aux larmes.

L’’énurésie, l’éjaculation précoce peuvent être des symptômes d’une fixation/régression à ce stade.

Le contrôle du sphincter vésical est source de fierté narcissique, due au fait que les parents font honte à l’enfant lors des échecs dans ce contrôle.

 

La masturbation infantile : ce plaisir est d’abord étayé sur la miction, puis s’en dissocie.

Cette masturbation peut être méconnue des parents. Elle est quelquefois laissée sans limites : l’enfant se masturbant en présence d’autres personnes de la famille.

 

2) la curiosité sexuelle infantile :

C’est la période de «la découverte de la différence des sexes » : ressentie en terme de présence ou absence de pénis : «  en avoir ou pas ».

Il ne s’agit pas de la découverte de la réalité de la différenciation sexuelle : seul le pénis a valeur d’existence : tant pour le garçon qui l’a que pour la fille qui ne l’a pas.

[Pénis = organe anatomique

Phallus = fantasme selon lequel la possession d’un pénis procure et signifie complétude et puissance.]

Le plaisir visuel : regarder son organe sexuel ou celui des autres, être vu, se montrer tout nu ; voyeurisme, exhibitionnisme, et attouchements sont banals à ce stade.

L’apparition de la question du comment on fait les enfants est une des conséquences de cette découverte.

La scène primitive : il s’agit de la scène au cours de laquelle l’enfant a été – ou fantasmé être- le témoin du rapport sexuel des parents. Elle fait partie des fantasmes primitifs.

 

 B) RELATION D’OBJET :

La relation d’objet n’est pas génitalisée ; certes il y a le primat de la zone génitale, mais la sexualité reste auto centrée. Il s’agit de se procurer du plaisir exclusivement à soi même.

La relation d’objet reste duelle (la triangulation intervient au stade suivant).

 

 C) ORGANISATION DE LA PERSONNALITE :

Le conflit en cause met en jeu le narcissisme de l’enfant: sentiment de complétude ou d’incomplétude.

L’instance mobilisée est l’Idéal du Moi.

L’angoisse de castration est, à ce stade, narcissique, prégénitale et phallique. Le pénis est pris pour un phallus, signe de puissance et de complétude. L’angoisse est auto-centrée ; il s’agit d’une angoisse d’incomplétude, de manque.

La conséquence de cette angoisse est la dépression.

 

 

 

4°) LA PHASE OEDIPIENNE : LE COMPLEXE D’ŒDIPE :

De la 4ème année à 6 ans. Il s’agit du premier stade génital.

C’est un conflit entre les 3 personnages familiaux : l’enfant, le père, la mère, on parle de triangulation de la relation d’objet.

« L’ensemble organisé des désirs amoureux et hostiles que l’enfant éprouve à l’égard de ses parents » (6)

 

A) LA SITUATION OEDIPIENNE :

Tout se passe comme si à cet âge, l’enfant éprouvait des désirs sexuels concernant le parent de l’autre sexe et ressentait le parent de même sexe comme un rival qu’il faudrait éliminer.

 

 a) chez le garçon :

 - attrait érotisé pour la mère,

 - relation au père : ambivalente : hostilité pour le père rival (supériorité réelle) mais aussi attachement pour le père modèle à imiter (dans le projet de séduire la mère ; plaire au père, se laisser façonner par lui)

 - angoisse de perdre son pénis, (constatation que d’autres enfants n’ont pas de pénis : preuve qu’on peut le perdre), d’être châtré par son père comme vengeance de son intérêt pour la mère, et pour le punir de ses conduites masturbatoires : angoisse de castration.

 - La menace de la castration et l’attitude maternelle non érotisée (compétition oedipienne n’est pas réelle mais seulement fantasmatique : puisque la mère a déjà choisi le père) aident le garçon 

 - Renonciation à la séduction érotique de la mère (objet incestueux) et à la compétition avec le père

 - Identification au père

 -

Dessin effectué par un garçon de 5 ans 4 mois, sa mère en robe de mariée lui tend les bras.

 

 b) chez la fille :

 - c’est la déception d’absence de pénis qui introduit la situation oedipienne, détournant la fille de sa mère

- réaction de chercher auprès du père ce que la mère a refusé : « envie du pénis » remplacée par le désir d’avoir un enfant du père : compensation possible

 - ambivalence de la relation à la mère :

. Hostilité contre la mère responsable de l’absence de pénis, (et aussi des contraintes de l’éducation sphinctérienne, de la naissance de frère et sœurs,…), hostilité chargée de culpabilité

. Attachement au 1er objet d’amour (vestiges de l’attachement préoedipien)

 - réalité : perte de l’illusion (d’avoir un enfant du père) : identification à la mère.

 

 -

 

Dessin d’une fille de 5 ans 3 mois, en princesse

 

Le Complexe d’Œdipe a un caractère fondateur :

- de toute société humaine : par l’interdiction de l’inceste et l’instauration de la morale

- dans la structuration de la personnalité 

 

B)L’ORGANISATION DE LA PERSONNALITE :

Le complexe d’Œdipe permet l’accession à la génitalité (avec dépassement de l’auto érotisme primitif, et orientation vers des objets extérieurs), et la constitution du Surmoi et de l’Idéal du Moi

 - Représentation de l’image de soi sexuée.( dessin)

 - Progrès du Moi : développement des mécanismes de défense contre l’angoisse :

Identification : à certains aspects idéalisés du parent de même sexe

Refoulement, déplacement, formations réactionnelles, régression,…

Sublimation :

 - Différenciation du Surmoi :

«  Le Surmoi est l’héritier du complexe d’Oedipe » FREUD

Il intervient comme une conscience morale interne, source de culpabilité en cas de transgression des interdits.

 - Idéal du Moi :

« Résultat de la convergence du narcissisme (idéalisation du Moi) et des identifications aux parents idéalisés » (6)

Constitue un modèle intérieur auquel le sujet cherche à se conformer

sentiment d’infériorité : trop gd écart entre le comportement d’un individu et son Idéal du Moi]

Adéquation des 2 satisfait le narcissisme, l’estime de soi.

 

 

5°) DE 6 ANS A LA PUBERTE :

 A) LA PHASE DE LATENCE :

Mise en sourdine de la sexualité (variable selon les cultures.) Toutefois tous les modes de plaisir antérieurs sont utilisés (à bas bruit)

L’enfant se trouve peu à peu disponible pour les apprentissages scolaires : entrée au CP, et cursus primaire.

Les enfants qui restent exagérément attachés sur un mode oedipien à un parent ont des difficultés à rentrer dans les apprentissages.

«Le monstre d’eau » garçon 7 ans 8 mois

 

B) LES RELATIONS D’OBJET :

Extension à l’extra parental : famille, école, société

 

 D) L’ORGANISATION DE LA PERSONNALITE :

Le Moi se renforce : le développement de la logique (phase opératoire décrite par PIAGET) permet une meilleure maîtrise du milieu extérieur.

Les mécanismes de défense se renforcent :

Identification : extra familiales

Refoulement : massif des représentations liées à la sexualité et aux relations oedipiennes (responsable selon Freud de l’amnésie des années précédentes

Sublimation : désexualisation des pulsions, déplacement vers des buts socialement valorisés : scolaires, extra scolaires, artistiques.

 

 

6°) L’ADOLESCENCE :

 

C’est une période de crise, de rupture d’équilibre déclenchée par l’arrivée de la puberté. F. DOLTO a parlé de « mort à l’enfance ».

« L’enfant est au bord d’une zone de turbulence que chacun doit traverser pour atteindre l’autre rive : l’entrée dans la vie adulte génitalisée. » (4)

Elle s’étend de 12 ans à l’acquisition de l’autonomie, de plus en plus tardive dans la société française actuelle, (20 ans ? 25 ans ?).

Les profondes transformations sont dues à différents facteurs :

- Facteurs biologiques :

La puberté est une véritable « catastrophe hormonale » : elle entraîne un déséquilibre temporaire massif physique et psychologique.

Le changement spectaculaire de morphologie fait que l’adolescent ne se reconnaît pas dans son corps, et se sent étranger : il ne se reconnaît plus dans la glace.

- Facteurs psychologiques :

Sur le plan intellectuel l’adolescent accède à la pensée formelle (PIAGET) avec la capacité d’abstraction et de généralisation.

Sur le plan affectif, il y a bouleversement et réaménagement des relations à soi même et à son propre corps, et aussi des relations aux parents, aux pairs, aux autres.

 

A) REMANIEMENT DES INTERETS :

Les nouveaux désirs dans le domaine sexuel sont exprimés dans les rêveries, les rêves, les conduites, où satisfaction et répression sont mêlés.

Les comportements évoluent : masturbation, flirts, relations amoureuses…

La répression des désirs sexuels utilise des moyens divers : cf. mécanisme de défense.

L’accès à la vie sexuelle sur un mode adulte assumé sans conflit est long et difficile.

 

B) RELATIONS :

L’entrée dans l’adolescence est immédiatement précédée par un retour vers le premier objet d’amour: la mère.

Puis apparaît la reviviscence du conflit oedipien. Il est générateur d’angoisse et pousse l’adolescent à renier son attachement familial. Il adopte des conduites d’opposition, avec des comportements plus ou moins provocants, il prend le contre-pied des opinions familiales. Comme s’il voulait contraindre les parents à prendre l’initiative de la rupture des liens.

 

C) PERSONNALITE :

 

Sur ce plan là aussi, l’adolescent doit opérer une véritable mue, un véritable changement de peau. C’est une période de vulnérabilité, de fragilité narcissique. L’identité est ébranlée : «  qui suis-je ? »

Les préoccupations narcissiques sont vives : sur occupation de la salle de bains, surinvestissement de l’image donnée à voir (tenue vestimentaire, coiffure), inquiétude et insatisfaction concernant le corps propre (importance des préoccupations pondérales des filles « toujours trop grosses »)

Pour protéger le Moi contre les exigences pulsionnelles nouvelles qui sont sources d’angoisse, pour faire face aux conflits qui l’agitent, l’adolescent remobilise tous les mécanismes de défense :

Il refoule, annule, rationalise, régresse, projette, se réfugie dans la rêverie

2 mécanismes de défense sont caractéristiques de l’adolescence :

L’intellectualisation : c’est un refuge dans le monde des idées, l’utilisation de pensées exagérément abstraites par peur de pulsion trop puissantes.

L’affect est transposé en idée et perd sa charge angoissante.

S’en suivent de multiples rationalisations, d’interminables discussions sur l’amour, la mort, considérés de façon abstraite.

« Les adolescents transforment volontiers leurs problèmes personnels en problèmes mondiaux » Anna FREUD

L’ascétisme :

Pousse l’adolescent à renoncer à tout se qui pourrait lui apporter du plaisir.

Il va s’imposer des privations, des épreuves sportives, refuser de se protéger du froid. (Pathologie : certaines anorexies)

.

Ces mécanismes sont souvent transitoires (sauf chez les jeunes qui s’engagent dans des filières d’études particulièrement sélectives, et qui vont développer tout particulièrement la sublimation)

La sublimation existe chez l’enfant, renforcée considérablement à l’adolescence ; il s’agit de transformer sa curiosité sexuelle en curiosité intellectuelle, dériver l’énergie de la pulsion sexuelle vers la curiosité intellectuelle, la création, une activité valorisée.

Le plaisir est tiré de l’activité de l’esprit, des performances intellectuelles, scientifiques, et artistiques.

 

 

 

Au terme de l’adolescence, la formation de la personnalité est achevée dans ses grandes lignes. Elle va continuer à s’enrichir tout au long de la vie adulte.

 

 

Bibliographie

1- J.BERGERET- Psychologie pathologique.1972, Masson

2- J.BOWLBY- Attachement et perte.1978, P.U.F

3- A. DELEGUE, psychologue à Polytechnique, conférence à l’ENS, « Classes prépa et Grandes écoles : le bonheur ? » France Culture, 2006

4- S.FREUD- Psychanalyse et théorie de la libido, in Résultats, idées, problèmes. 1985, P.U.F.

5- S.FREUD- Petit abrégé de psychanalyse, in Résultats, idées, problèmes. 1985, P.U.F.

6- J. LAPLANCHE et JB PONTALIS - Vocabulaire de psychanalyse.1967, PUF

7- M.MALHER- Symbiose humaine et individuation. Psychose infantile.1973, PAYOT

8- Ph. MAZET, D. HOUZEL – Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. 1993, MALOINE

9- JD.NASIO- Introduction aux œuvres de Freud, Ferenczi, Groddeck, Klein, Winnicott, Dolto, Lacan.1994, Rivages/Psychanalyse

10- R.SPITZ – De la naissance à la parole, la première année de vie de l’enfant.1968, P.U.F.

11- D.W.WINNICOTT- De la pédiatrie à la psychanalyse.1969, PAYOT

12- D.W.WINNICOTT- Processus de maturation chez l’enfant.1970, PAYOT


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