Dr Fabrice LORIN : L'Effet Placebo et la douleur: faux médicament, pouvoir de l'illusion ou mensonge qui soigne
Dr Fabrice LORIN Centre d’Evaluation et de Traitement de la Douleur
Hôpital Saint Eloi
CHU de Montpellier f-lorin@chu-montpellier.fr
Cours Faculté de médecine, DIU prise en charge de la
Douleur
Spinoza : Nous ne savons toujours pas de quoi un corps est
capable.
Rabelais : Les joyeux guérissent toujours
1-INTRODUCTION : définition et histoire
La réponse antalgique au placébo chez les patients atteints de neuropathie diabétique varie entre 0% et 80% avec une moyenne de bonne réponse à 30%. Le même pourcentage d'efficacité est retrouvé dans la migraine, les troubles fonctionnels intestinaux, mais aussi dans la dépression sévère et les douleurs du cancer. Alors qu'est-ce qu'un placébo? Le placebo est pourtant un produit inerte
pharmacologiquement.
La médecine utilise depuis des
milliers d’années l’effet placebo. Une étude menée par l'Institut américain de la santé (NIH) et publiée par le British Medical Journal en octobre 2008, montre que la moitié des médecins américains prescrivent régulièrement et sciemment des placébos! Par exemle de type vitamines, sédatifs etc. Ils invoquent le nombre élevé de malades imaginaires qui consultent pour dépression ou affections psychosomatiques.
Il
existait déjà dans l'antiquité grecque, puisqu’il y a 2500 ans le sophiste
Gorgias, démocrate, orfèvre de la rhétorique et professeur à Athènes du jeune étudiant Hippocrate, se plaisait à dire que : « par
la parole j’ai plus de réussite dans les soins aux malades que mon frère
médecin ».
Dans l’évangile de Marc, après plusieurs exemples de guérisons miraculeuses (Marc était médecin et visiblement intéressé par la pathologie) nous voyons
Jésus s’y reprendre à 2 fois pour guérir un aveugle avec une préparation à base
de crachat et d’imposition des mains (Marc 8-23):
Prenant l'aveugle par la main, il le conduisit hors du village. Il mit de la salive sur ses yeux, lui imposa les mains et lui demandait : « Vois tu quelque chose? » Ayant ouvert les yeux, il disait : « j'aperçois les gens, je les vois comme des arbres, mais ils marchent. » Puis, Jésus lui posa de nouveau les mains sur les yeux et l'homme vit clair; il était guéri et voyait tout distinctement.
Le premier vrai médicament, le quinquina,
n’est apparu qu’en 1638. Avant le malade absorbait des glandes de putois, des
vers de terre, viande pourrie, bave de crapaud.
Molière qui n'était pas dupe de la médecine du 17ème siècle s'est bien moqué des saignées et purgatifs.
Les chineurs à la recherche de
vieux pots à pharmacie dans les brocantes chercheront l’inscription Mica panis :
c’est de la mie de pain un placebo. Le latin est une langue magique quand il est incompris. La messe en latin utilisait ce ressort psychologique.
Il est un traitement efficace en
moyenne à 30-40% dans les maladies. Si un médicament reçoit l'AMM (Autorisation Mise sur le Marché) lorsqu'il est efficace à 60%, la différence entre un placébo et un médicament est de 20-30%. A méditer.
L’effet placebo est à la frontière
entre science et magie. Pour certains, il est l’angle mort de la
médecine, ou le point aveugle. Mystérieux.
La population française est la première consommatrice au
monde de médicaments, soit 150 millions de boites par an. Que représentent les
placebos ? À peu près 40% des prescriptions médicales et il faut rajouter
l’automédication. Les économistes pourraient certainement nous dire le chiffre
d’affaire annuel de la vente de placebos; un calcul basé sur les dépenses en France en médicaments en 2006: 32 milliards d'euro, soit 284 € par français et par an, pour 200 €/an en GB, Espagne, Italie.
Quelques expériences prouvent
l’existence de l’effet placebo :
Des élèves policiers vont assister
à leur première autopsie. Ils vont recevoir un médicament avec un jus d’orange,
pour apaiser leur anxiété. Une moitié reçoit à son insu un placebo et l’autre
un bêta bloquant : les 2 groupes constatent une réduction identique de
leur anxiété.
Un chirurgien décide de traiter l’angine
de poitrine sévère (juste avant l’infarctus), par la ligature de l’artère
mammaire interne ou par un simulacre d’intervention soit une simple incision
cutanée : 6 mois après le même % des 2 groupes était bien amélioré. C'est la chirurgie placebo.
Tout
commence par une prière, celle des vêpres des morts de la liturgie catholique,
le psaume 114 :
« Placebo
domino in regione vivorum… » : Je plairai à Dieu au royaume des
vivants.
Placebo : je plairai et par extension
métonymique l’homme intriguant.
Le
placebo est un faux médicament, un mensonge
qui soigne.
Si
40% de l’effet des traitements en médecine est lié au placebo, devrait-on
consacrer 40% de l’enseignement de la thérapeutique à la question des placebos?
2-INVENTAIRE :
2.1 - Placebo purs
Ils se réduisent aux imitations de médicaments :
L’eau
distillée, pilule d'amidon, gélule
de farine... ont pour dénominateur commun l'inertie pharmacologique
et opèrent par illusion du contenant et du contenu.
Le placebo pur modifie aussi les gens en bonne santé ! :
On a donné à des étudiants en médecine en parfaite santé,
un comprimé de lactose sans rien dire de l’effet éventuel. Le lendemain on
explore 3 catégories de symptômes : physique, intellectuels et humeur. 20%
avait noté un changement, pour moitié vers une amélioration, l’autre moitié
vers une aggravation : c’est l’effet nocebo.
Le seul placebo pur disponible sur le marché était un
médicament homéopathique : saccharum lactis. Belle ruse de l'industrie pharmaceutique:
produire un placebo reconnu pour donner ensuite une image de vrai médicament au reste
de la production homéopathique.
Plus récemment, le Dr Aulas a mis sur le marché Lobepac
rouge /bleu (anagramme de placebo)
Deux particularités françaises sont des placebos purs
déguisés : l’homéopathie et l’eau minérale.
2.1.1 Homéopathie
L'homéopathie vient de homeïos: similaire et pathos: souffrance, maladie. En 1997, 36% des français ont utilisé l'homéopathie. En 2006, le chiffre d'affaire du laboratoire BOIRON est de 400 millions d'euro. L’homéopathie à une dilution de 9 CH peut s’apparenter à
un placebo.
Les bases de l'homéopathie
L'homéopathie repose
sur quatre principes : la similitude, la dilution, la dynamisation et la
personnalisation.
Le principe de similitude.
Une personne atteinte de maladie peut être traitée au moyen d'une substance qui peut produire des symptomes semblables à ceux de la maladie, chez une personne en bonne santé. L'homéopathie est issue des observations et de l’imagination de Friedrich HAHNEMANN,
né en Saxe en 1755, un an avant MOZART. Apprenant qu’une décoction d’écorce de
quinquina (cf. la nivaquine) est censée guérir le paludisme, il teste sur
lui-même les effets de ce produit. Il ressent alors des troubles, en fait les
troubles du surdosage et de l'intoxication, à type de céphalées, troubles visuels, vomissements et surtout fièvre élevée qu’il
assimile aux symptômes de la maladie. C’est une révélation! Il en tire la
règle de base de l'homéopathie : " Similia similibus curantur ", les
semblables sont guéris par les semblables. A l'inverse de Contraria contrarii curantur, les contraires soigent les contraires. Tout produit
capable de provoquer sur un sujet sain
les symptômes d’une maladie est capable de la guérir. La dose toxique et les effets secondaires deviennent la maladie à traiter...
Après expérimentation de multiples drogues et poisons sur lui-même
et ses disciples, il publie, en 1819 à 64 ans, " L’organon de l’art de guérir
", qui deviendra la Bible
des homéopathes. Un organon désigne
un texte théorique et méthodologique destiné à servir de guide pour la
réflexion philosophique.
Imagine-t-on par exemple un antibiotique reproduire sur un homme
sain les symptômes de la maladie qu’il guérit ? Difficilement et c ‘est là tout
le hiatus conceptuel entre homéo et allopathie.
La dilution.
Afin d’éviter les ennuis provoqués par l’ingestion de produits
souvent dangereux utilisés sous forme brute et à dose toxique, Hahnemann procède
à leur dilution. Hahnemann part d’une solution mère obtenue, par exemple, par
macération de graines de café dans de l’eau. Il prend une goutte de la solution
mère qu’il mélange à 99 gouttes de solvant (eau ou plus rarement alcool). Il
obtient ainsi le dosage 1CH (Centésimale Hahnemannienne). Il prélève une goutte
de cette solution et la dilue à nouveau dans 99 gouttes de solvant (2CH). Et
ainsi de suite jusqu’à 30CH (Limite actuelle des préparations homéopathiques).
Le volume de solvant nécessaire à la dilution immédiate permettant
d’obtenir une solution 30CH est, celui d’un cube dont l’arête est d’environ 2
millions de fois la distance de la terre au soleil qui est de 1.5 millions de
km (2 millions x 1.5 millions de Km = 3 milles milliards de Km)... Pluton est seulement à 6000 millions de km du soleil. Nous sortons du système solaire... 10 CH c'est une goutte d'eau dans le lac LEMAN, 23CH c'est une molécule d'eau dans l'ensemble des océans de la terre.
En fait on doit considérer que toute dilution supérieure à 8 ou 9
CH ne contient plus rien.
La dynamisation
Hahnemann indiqua qu’à chaque opération le flacon devait être
secoué une fois d’abord, puis deux fois à la seconde dilution et ainsi de
suite...
Le granule serait un médicament "informationnel".
Personne ne sait vraiment ce que cela veut dire et aucune explication tant soit
peu raisonnable n'a jamais été fournie à ce sujet.
Notons au passage que pour les purs homéopathes, plus c’est dilué,
plus c’est dynamisé, et donc plus c’est actif...
La personnalisation Le véritable levier thérapeutique de l'homéopathie.
« L'homéopathie soigne des malades, pas des maladies».
Une variante est sortie récemment à l’occasion des mesures
de déremboursement de l’homéopathie : « l’homéopathie ne guérit pas
les maladies mais soigne la santé » ! Bel oxymore, c’est le
commencement de la fin mais hâtons nous lentement car il est urgent d’attendre.
En fait les homéopathes raisonnables reconnaissent une
centaine de tempéraments. Ainsi on est, par exemple, sulfur, arsenicum, ou
pulsatilla.
La grande qualité que l’on peut porter au crédit des homéopathes
est qu’ils se sont toujours autant intéressés au malade qu’à sa maladie. Ce que
n’ont pas toujours fait beaucoup de leurs confrères pressés par les contraintes
de leur réussite sociale. L'attention que le médecin va porter à son patient,
par la compassion qu'il va manifester à son égard et surtout par le temps qu'il
va passer en sa compagnie.
Avec l’homéopathie nous ne sommes plus dans la science mais au cœur de la croyance. L’étude sociologique d’Henri BROCH du laboratoire de Sophia Antipolis montre que les femmes croient beaucoup plus que les hommes dans l’homéopathie, l’astrologie ou le paranormal, avec un pic entre 18 et 25 ans. A l’intérieur de ce groupe femme apparaît un pic chez les enseignantes, plus précisément avec un niveau d’études supérieures non scientifiques. A l’inverse, les agriculteurs sont les moins crédules. En prolongeant ma réflexion, il apparait clairement que l'affaiblissement durable des pratiques religieuses dans les pays industrialisés, sauf les USA, s'accompagne d'un mouvement où le surnaturel investit de plus en plus l'organisation de la vie et des pouvoirs, les cadres institutionnels de la croyance. Moins il ya de pratique religieuse, mieux l'irrationnel se porte; l'homéopathie, la voyance, les sectes et les parasciences n'ont plus à se plaindre de la diminution des Eglises instituées. La baisse de la croyance religieuse a pour corrolaire une augmentation de l'attirance vers l'homéopathie par exemple. Simple mécanisme de déplacement au sens freudien. Mais pourquoi ? Sentiment religieux et croyance irrationnelle sont-ils immanents à l' Homme ? L'éthymologie du verbe croire vient de la racine amn, qui signifie en hébreu comme en arabe: faire confiance (à Dieu). Le croire actuel est trop souvent imprégné de folklore: croire aux fantomes, au Père Noël, en Dieu, en l'homéopathie...Bien loin de la transcendance.
2.1.2-Thermalisme
L’eau minérale des stations thermales : une tradition
bien française depuis nos ancêtres les gaulois. Plus l’eau est pure, plus elle
sera douée de vertus thérapeutiques. Aucune étude n’a confirmé l’efficacité des
eaux thermales. La sécurité sociale finance l’aménagement du territoire :
les emplois, l’hôtellerie, la restauration, le bâtiment; les casinos occupent les curistes et
rapportent de l’argent à l’Etat.
Les eaux minérales
ont bien évidemment des qualités singulières selon le lieu de recueil. L’eau
Hépar est bien adaptée au nourrisson et dans le traitement de la constipation, en raison de sa richessse en magnésium favorable au transit.
La question n’est pas dans la distinction de ces qualités et différences entre
les eaux mais de savoir si l'eau est un vrai médicament avec service médical rendu (SMR) et si la sécurité sociale doit la rembourser. La France est le seul pays au
monde à rembourser les cures thermales.
La
France
est régulièrement classée par l’OMS premier pays au monde pour la qualité de sa
médecine de haut niveau. En parallèle nous sommes leader mondial de
l’homéopathie et du thermalisme, les 2 bien sur remboursés par la sécurité
sociale. Y a t’il un lien ?
2-Les placebos impurs : 50% du Vidal et 40%
des prescriptions médicales + l’automédication.
Ce sont des médicaments officiels de peu d'efficacité intrinsèque
mais dotés de pouvoirs aux yeux du grand
public, confortés par les encarts publicitaires. C'est un bon objet car s'il ne
fait pas beaucoup de bien, il ne fait pas de mal.
Citons les cocktails vitaminiques, les psychostimulants
pour étudiant préparant un examen, les
médicaments du sujet âgé à
visée "vasculaire
cérébrale", et pourquoi pas les antibiotiques prescrits systématiquement,
même dans une infection virale. Les injections de calcium ou de magnésium dans
la tétanie normo calcique, qui entraînent une sensation de chaleur
interne plaisante et salvatrice.
Citons la carnitine ou Lévocarnine, dans le traitement de la fibromyalgie.
Le SMR ou Service Médical Rendu est très mince et ces
médicaments sont de plus en plus dans le collimateur du déremboursement par la
sécurité sociale.
3
- Extension de l’effet placebo au marketing : la valeur ajoutée
Les médicaments actifs auront une présentation bien
étudiée par les laboratoires pharmaceutiques, et on cherche à renforcer
l'évocation de l'effet du produit.
Le nom : le marketing pharmaceutique est aussi
élaboré que dans l’industrie automobile. Viagra évoque la vie, Xsens suppose la
sensualité, Lévitra a pour slogan publicitaire « Rallumez le
feu ! ». Une chanson de Johnny HALLIDAY, c'est tout dire.
La taille :
-le petit médicament sous entend une puissance énorme
-le gros médicament,impossible à avaler, évoque une énorme quantité de substance active
donc efficace.
Le goût : de préférence amer.
La couleur:
- bleu clair ou rose pâle sont recommandés pour les tranquillisants et hypnotiques
- rouge ou jaune vif pour les dynamisants
- jaune ou orange pour le foie
- marron pour les laxatifs...
La forme galénique : si vous toussez, un sirop
liquide épais conviendra mieux qu'une
gélule
La voie
d'administration
: une injection intramusculaire de
tranquillisants en urgence est jugée plus efficace, alors que l'absorption per os est aussi rapide.
Le prix du médicament et de la
consultation.
Etre illisible dans l’écriture de l’ordonnance
pour garder le mystère chamanique de la prescription. Depuis la nuit des temps chamaniques, trois techniques thérapeutiques existent: le couteau qui a donné la chirurgie, la plante qui a donné les médicaments, l'incantation qui a donné le traitement par la parole.
4 - Le médecin lui-même
Deus ex machina, le médecin par sa
seule présence lors d'une visite ou
d'une consultation, suffit à apaiser bien
des symptômes.
Le rituel voir le cérémonial de la
prescription est un moment d’intense émotion.
Plus un médecin est compétent dans
une pathologie, plus il sera sûr de lui, plus il sera placebo inducteur. Dans la saga des Rougon-Macquart, Emile ZOLA souligne: « Le médicament ne vaut que par la main qui le donne ».
2 maximes :
Un médecin optimiste a de meilleurs résultats qu’un
médecin pessimiste.
Le charlatan chaleureux a plus de résultats que le
scientifique sceptique.
En 1997, le Dr Thomas,
généraliste à Southampton sélectionna dans sa clientèle 200 malades qui se
plaignait de troubles fonctionnels: maux de tête, dorsalgie, fatigue, et chez qui les examens médicaux
n'avaient rien retrouvé. Il les réparti en deux groupes et termine la
consultation des 100 premiers en donnant un diagnostic précis, en affirmant
avec fermeté et conviction que « tout irait rapidement mieux ». Pour les
autres, son diagnostic resta volontairement évasif et il proposa aux patients
de revenir le voir en l'absence d'amélioration. Résultat : 64/100 patients du
premier groupe furent améliorés contre seulement 39/100 dans le second.
Prendre un médicament, avaler une hostie ou le pain de la
communion, relèvent du salut et du transfert.
Mais il y a d'autres facteurs sociaux qui interviennent : le pharmacien, les
infirmières, les aides soignantes...
5-Chirurgie placebo : « opération fantôme »
6- Dieu et le placebo :
La religion devient un sujet d’études surtout aux USA.
On a donc fait une étude Dieu versus Placebo, randomisée
en double aveugle. L’étude de Byrd dans les années 80 a été réalisée à partir
de 400 malades admis dans un service de cardiologie. Les malades sont répartis
de manière aléatoire en 2 groupes : les 2 groupes vont recevoir un placebo
identique, mais la liste des patronymes figurant dans le premier groupe est
transmise à des volontaires chargés de prier pour eux. La liste n’est connue ni
des patients ni des médecins. Ils auront ce qu’on appelle une prière
d’intercession. Au final les patients pour lesquels on a prié s’en sortent
mieux que les patients contrôle et surtout dans les cas graves. L’inverse n’est
jamais vrai. Au passage, l’existence de Dieu est prouvée scientifiquement !
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ces études sont très discutées. Si votre grand-mère vous propose de prier pour vous, acceptez! Voir même demandez à vos proches de prier pour vous. /p>
Après les alicaments, le médecin pourra prescrire
des relicaments : 3 ave et 2 pater.
En fin de compte le placebo témoigne des capacités propres à l'individu à
se soigner, se restaurer, se réparer hors de l'action chimique d'un produit,
mais dans le cadre de la relation thérapeutique. Les facultés de mood repairréparation de l'humeur, de pain repair réparation de la douleur, et plus généralement de life repair réparation des accidents de la vie, sont déterminants.
3- L’EFFET NOCEBO :
Curieusement, l'effet placebo peut s'inverser. Il devient
alors nocebo, du latin
« Je nuirais ». Il recouvre les effets secondaires
négatifs qui apparaissent suite à un traitement que l'on croit efficace.
Exemple : la douleur abdominale ressentie dans les minutes qui suivent la prise
d'un médicament. Ces mécanismes d'apparition sont encore flous. L'auto
conditionnement du patient intervient probablement comme son contexte
socioculturel. Mais aucune étude rigoureuse ne lui a été consacrée à ce jour. «
L’effet nocebo est une réalité pour un patient sur quatre » avance le Dr Bartsky
psychiatre à Boston en 2004. « L’effet nocebo n'est jamais pris en compte. Dans
les essais cliniques, tous les symptômes négatifs sont mis sur le compte du
médicament testé alors que certains sont uniquement dus à l'effet nocebo, ce
qui fausse les données ».
« On a vu un homme de bonne foi faire un coma
impressionnant de 24 heures et être admis en service de réanimation après avoir
absorbé deux boîtes de placebos ! » raconte le Pr. Lemoine chef de l'unité de psychiatrie
biologique de l'hôpital du Vinatier.
4- MECANISMES DU
PLACEBO
4.1 Système nerveux :
La neurobiochimie a mis en évidence le rôle de la
sécrétion
-d'endorphines, des opioïdes endogènes. L'inhibition par la naloxone est classique.
-de dopamine dans la voie nigrostriée chez les patients
parkinsoniens
Les patients déprimés recevant un traitement placebo ont
un changement EEG du cortex préfrontal droit et une augmentation métabolique du
glucose au TEP scan dans les cortex préfrontal, cingulaire antérieur, sur des
aires à projection sérotoninergique.
4.2 Système endocrinien :
L’axe corticotrope et la stimulation surrénalienne
d’adrénaline et noradrénaline.
4.3 Système immunitaire :
Le stress a un effet placebo! En cancérologie, le psychisme joue un rôle important. En
1990, une expérience a démontré que chez le rat, l'évolution de tumeurs
cancéreuses différait selon le niveau de stress de l'animal. Des rongeurs, tous
porteurs d'une tumeur cancéreuse greffée, ont été répartis en trois groupes. Le
premier groupe témoin est laissé tranquille. Dans les deux autres, les animaux
recevaient des chocs électriques de manière répétée, et seuls ceux du troisième
groupe pouvaient contrôler le stress par le biais d'une manette mettant fin aux
chocs électriques. Un mois après, tous les animaux ont été autopsiés. Dans le
premier groupe témoin, le taux de rejet de la tumeur a été de 50 %. Dans le
second, il était de 27 % et dans le troisième de 63 %. Ce qui laisse à penser
que le stress, si il peut être contrôlé, a un effet anticancéreux, un effet
antimitotique supérieur à l’absence de stress. Il est donc souhaitable
d'associer étroitement le patient au déroulement du traitement anticancéreux.
Une étude sur les veuves de Boston, confirme la survenue
d'une dépression immunitaire quelques semaines après le décès de leurs époux,
en dehors de toute anomalie biologique antérieure chez ces femmes.
Et au printemps 2005, une étude britannique de Steptoe
s'est intéressée aux effets des sentiments positifs sur la biologie humaine.
L'équipe londonienne a, dans un premier temps, classer les personnes selon leur
degré de bien-être général par le biais de tests validés en psychiatrie. Puis
elle a dosé le cortisol et le fibrinogène. Le cortisol élevé est souvent
associé à l'obésité, au diabète, à l'hypertension artérielle au à des
affections auto-immunes. Quand au fibrinogène il joue un rôle important dans la
coagulation sanguine et une élévation de son taux augmente considérablement les
risques d'un AVC. Résultat : les dosages les plus bas de ces deux marqueurs,
facteurs de bonne santé cardio-vasculaire, ont été retrouvé chez les personnes
les plus à l'aise dans leur peau.
On sait qu'une mauvaise
nouvelle, par exemple un échec inattendu à un examen, peut déprimer
temporairement le système immunitaire. À l'inverse, une bonne nouvelle le
stimule. Quant au contrôle qu'exerce le placebo sur la douleur, les chercheurs
sont maintenant convaincus que le cerveau d'une personne recevant un placebo
perçu comme un puissant médicament anti-douleur libère des endorphines, des
hormones qui s'apparentent à la morphine et qui chassent la douleur. Les placebos obtiennent 70 % de
résultats positifs lorsqu'ils s'attaquent au mal de tête, 58 % pour les troubles
digestifs, 40 % pour les douleurs postopératoires.
Ensuite plusieurs équipes se sont affairées autour de cet effet placebo afin de trouver une corrélation entre la diminution de la douleur chez les patients traités par placebo, et les zones cérébrales mobilisées à ce moment.
En 2002, une étude a été menée sur des volontaires préalablement soumis à des brulures légères de la peau, puis recevant soit un antidouleur dérivé de la morphine, soit un placébo, soit rien. Les sujets des trois groupes ont ensuite passé un PET-scan qui a permis d’observer l’activation d’une même zone cérébrale chez les trois groupes : le cortex cingulaire antérieur.(Etude menée par Martin Ingvar, Institut Karolinska de Stockholm, Suède).
Puis début 2005, une nouvelle étude a été menée sur des volontaires sains auxquels été administrés des chocs thermiques ou électriques tout en contrôlant les zones cérébrales mobilisées par la douleur par Imagerie par Résonnance Magnétique (IRM). Dans cette première étape, le thalamus et le cortex sensoriel moteur étaient stimulés. Par la suite, les volontaires se sont vu appliqués une « nouvelle » crème sensée diminuer la douleur sur les zones de stimulations douloureuses. Une partie de ces volontaires ont reçu une crème pharmacologiquement efficace tandis que l’autre partie, une substance inerte. Dans ce dernier groupe les zones de la douleur observées par IRM étaient moins activées que lors de la première expérience, prouvant donc l’action de l’effet placebo sur la perception de la douleur. (Etude menée par l’équipe de Tor Wager, Université du Michigan, Etats-Unis).
Enfin, en Aout 2005, une étude sur des volontaires sains soumis à des stimulations douloureuses a été effectuée à nouveau. Le contrôle des zones cérébrales mobilisées a été réalisé en couplant les deux méthodes : PET-scan et IRM.
Les résultats sont équivoques : chez les patients croyant avoir reçu un antidouleur (remplacé par un placebo), une sécrétion d’endorphines a été observée. (Travaux du psychiatre Jon-Kar Zubieta, Université du Michigan, Etats-Unis).
Les résultats de ces études montrent que l’administration d’un placébo (supposé être un antidouleur pour le patient) met en place des mécanismes étant tout à fait identiques à ceux induits par un véritable antalgique.
Cependant, les endorphines ne sont pas les seules à intervenir et d’autres neurotransmetteurs sont à identifier avant de pouvoir comprendre totalement le fonctionnement de cet effet placebo.
Après le comment ça
marche, le pourquoi ça marche ?
Sujets « placebo-répondeurs » et « placébo-résistants »
Certains sujets répondent mieux à l’administration du placébo que d’autres. De nombreux travaux ont été consacrés à l’étude de leurs caractéristiques respectives, dans l’espoir de dégager le portrait type du placébo-répondeur et du placebo-résistant :
Cependant peu de corrélations ont été démontrées entre la placébo-sensibilité et les caractéristiques physiologiques et démographiques (5, 12) .
Bien que des comparaisons statistiques multiples soient pratiquées afin d’élaborer de telles relations, certains caractères peuvent apparaître comme liés à la placebo-sensibilité. Cependant l’interprétation statistique de nombreux tests faits sur les mêmes sujets est hasardeuse et nécessite une confirmation indépendante.
Ainsi deux chercheurs ont rendu des résultats : Lasagna en 1954 trouve une relation entre le sexe, l’intelligence et la sensibilité au placebo. Puis Moertel en 1976 affirme qu’il existe une corrélation entre le caractère non-fumeur, le niveau d’instruction, le métier, le statut marital, le nombre d’enfants et la placebo-sensibilité. Mais ces études demandent des confirmations.
L’étude des caractéristiques psychologiques du sujet est particulièrement intéressante. Il a été reporté que chez les névrotiques, le niveau d’intelligence apprécié par l’aptitude verbale peut être lié au résultat d’un traitement par placébo.
Parmi les antécédents, la durée de la maladie et les traitements antérieurs peuvent jouer un rôle : les malades plus anciens ayant été traités par divers médicaments réagiraient moins bien au placebo que des patients n’ayant pas eu de pathologies associées à des traitements lourds ou longs.
Néanmoins il est vraisemblable que les sujets placebo-répondeurs dans une situation donnée, n’ont pas nécessairement les mêmes caractéristiques que les placébo-répondeurs dans des circonstances différentes.
Enfin et surtout l’affection traitée joue aussi un rôle important : un effet placebo peut être obtenu dans toutes sortes d’états pathologiques, mais son importance est d’autant plus grande que la maladie est moins serieuse et que l’effet pharmacologique propre du traitement est plus faible.
Une étude suédoise en 2008, identifie pour la première fois un variant génétique impliqué dans l'effet placébo. Chez certains patients, des variantes génétiques rendent l'effet placébo aussi efficace que le vrai traitement.
La relation médecin/malade est centrale. D'abord, il y a l'effet Hawthorne, c'est la volonté du patient ne ne pas décevoir le médecin. Les psychanalystes avancent le désir qu’a le malade de
séduire le médecin : « Le médecin peut
représenter à la fois une mère, nourricière et protectrice, et un père, rival
dangereux et puissant, sur qui transférer ses affects infantiles. Il faut
séduire le parent médecin, lui plaire et pour lui plaire, guérir. Comme le
petit enfant qui se décide à manger pour faire plaisir ». La
guérison résulterait ainsi d'un savant cocktail de foi, d'amour et de réciprocité. Comme tu t'occupes de moi, je vais aller mieux. Auquel
s'ajoutent aussi deux doigts de soumission. A l'image du malade hospitalisé qui
se doit d'être alité au moment de la visite de son médecin, l'acte de soin
exige de la docilité de la part du patient. «
Accepter qu'un Autre vous soigne, c'est accepter la dépendance et l'aliénation
» dit le Dr Lemoine. Mais cela renverse la première définition du placebo: souvenez-vous le médecin veut plaire, séduire voire tromper le malade. Mais le malade veut aussi plaire au médecin.
Conclusion :
Favoriser les processus naturels de guérison, ne fait-il
pas partie des missions de la médecine ?
L’Homme est un animal qui aime le médicament, de la
chimiothérapie la plus explosive au granule homéopathique à dose
infinitésimale.
Platon, pourtant ennemi des sophistes, disait déjà: « un mensonge n'est utile aux
hommes qu'à titre thérapeutique ».
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